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Analyse annuelle de la croissance 2014 – La Commission européenne fixe les priorités de la politique économique en Europe
Le 13 novembre 2013, la Commission européenne a ouvert le Semestre européen 2014 pour la coordination des politiques en publiant l’Analyse annuelle de la croissance (AAC) de cette année. Dans cette AAC, la Commission fixe les priorités des politiques économiques des États membres de l’UE pour 2014. Afin de garantir que les États membres suivent les exigences énoncées dans l’AAC, la Commission commencera bientôt à rédiger ses recommandations spécifiques par pays.
Comme lors d’exercices semestriels précédents, la Commission vise en particulier à instaurer l’austérité, à stabiliser le système financier et à rendre les biens et services européens plus compétitifs sur le plan des coûts au niveau international. À cette fin, elle préconise régulièrement des politiques qui se sont révélées très dommageables pour les travailleurs d’Europe : attaques contre les structures de négociations collectives, coupes dans les dépenses sociales, réformes du marché du travail favorables au patronat sont des résultats typiques du Semestre européen. La brochure « Chambre des horreurs de la gouvernance économique de l’UE », publiée par UNI Europa, décrit les politiques de ce type, extrêmement néfastes, mises en œuvre récemment.
En 2014, les affiliés d’UNI Europa devront, en particulier, assurer le suivi de deux annonces contenues dans l’AAC 2014.
1 Libéralisation du secteur des services
Vu la persistance de la stagnation économique, la Commission tente de stimuler un retour à la croissance en libéralisant totalement les marchés des services. L’AAC 2014 appelle dès lors à une « application rigoureuse » de la directive européenne sur les services dans tous les secteurs tertiaires européens. La Commission réaffirme ainsi sa volonté de mettre en péril le progrès social et des conditions de travail décentes, dans sa quête de retombées économiques imprévisibles. Comme UNI Europa le soutient depuis longtemps, la directive sur les services encourage le dumping social, une concurrence transfrontalière malhonnête et la création d’oligopoles. Une gouvernance économique européenne qui œuvre dans l’intérêt à la fois des travailleurs, des consommateurs et de la société requiert un bien meilleur équilibre social.
Faisant fi de ces graves réserves, la Commission poursuit ce programme hostile aux travailleurs et prescrit des mesures détaillées de réforme pour les secteurs des services des différents États membres. Il convient de souligner qu'elle réclame une libéralisation complète du secteur du commerce de détail espagnol en 2013. Le Conseil européen s'est félicité de cette approche pendant sa réunion des 24 et 25 octobre. Il faut donc s’attendre à d’autres initiatives de l’UE en faveur d’une poursuite de la libéralisation des services.
Les syndicats des services aux niveaux national et européen doivent donc se tenir prêts à défendre les intérêts des travailleurs européens des services. Il faut exposer aux décideurs nationaux et européens l'hostilité du mouvement syndical à cette libéralisation des services et les informer de la nécessité de suivre une autre approche pour résoudre la crise. Avec notamment la proposition de la CES pour un « Plan d’investissement, une croissance durable et des emplois de qualité », le mouvement syndical européen a élaboré des solutions viables et socialement équilibrées pour remplacer le mélange actuel d’austérité et de réformes structurelles. Les syndicats européens doivent plaider pour ces solutions de remplacement par des actions coordonnées à tous les niveaux.
2 Attaques contre le dialogue social et la réglementation sociale
La Commission estime que les lourdeurs administratives sont une des principales raisons du manque de croissance dans l’UE. C’est pourquoi elle est déterminée à abroger les législations susceptibles de gêner les grandes entreprises. Sa tristement célèbre communication REFIT, qui considère tout le domaine des réglementations en matière de santé et de sécurité au travail comme potentiellement superflu, est le premier fruit de ce programme néo-libéral. L’UE se gardera donc de proposer des législations sur la prévention des troubles musculo-squelettiques (par ex. les maux de dos), le principal souci de santé dans la plupart des secteurs des services. De plus, en refusant de transposer en droit un accord des partenaires sociaux sur la santé et la sécurité au travail dans le secteur de la coiffure, la Commission a déjà prouvé qu’elle était prête à attaquer le dialogue social si celui-ci fait obstacle à l’approche de la communication REFIT.
L’AAC 2014 annonce des mesures similaires à la communication REFIT comme principaux projets de la Commission pour l’année prochaine. UNI Europa a déjà déclaré que sa principale priorité serait de combattre cette attaque contre le dialogue social, contre l’Europe sociale et contre la santé des travailleurs des services. Pour contrer efficacement le programme REFIT de la Commission, il faut une campagne forte qui combine des activités de lobbying, des actions juridiques et une mobilisation de l’opinion publique. Il est indispensable d’établir un lien fort entre les niveaux local et européen du syndicalisme européen pour défendre la vision d’une Europe sociale, face à la gouvernance économique actuelle de l’UE.
Conclusion : L’Europe sociale est la seule voie possible
Avec l’Analyse annuelle de la croissance de cette année, la Commission affine encore sa stratégie néo-libérale, antisociale pour la résolution de la crise. Les concepts d’austérité, de réformes structurelles et de libéralisation continuent à dominer la gouvernance économique de l’UE. Bien que la Commission reconnaisse que les partenaires sociaux et les parlements nationaux doivent se voir attribuer un rôle plus important dans le processus décisionnel, il n’est pas sûr qu’elle soit prête à céder aux demandes des parties intéressées et à changer de cap.
Comme indiqué dans le document de position d’UNI Europa « Pour une gouvernance économique démocratique et socialement responsable », les syndicats du secteur tertiaire d’Europe ne peuvent accepter une gouvernance économique néo-libérale européenne sourde aux préoccupations des travailleurs des services d’Europe. C’est pourquoi le mouvement syndical européen continuera à exprimer son opposition à l'approche de la Commission et à réclamer de l’UE un changement de cap en matière de gouvernance économique : une autre gouvernance économique de l’UE, une gouvernance qui soit effectivement socialement responsable et démocratique, est une condition préalable pour que le mouvement syndical continue à soutenir le processus d’intégration européenne.