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75% des salariés de France Télécom ont répondu au questionnaire
La série de suicides chez France Télécom, 25 décès depuis 18 mois, a initié un débat d’une ampleur sans précédent sur la souffrance au travail.
En septembre, le ministre du travail, Xavier Darcos, recevait Didier Lombard, PDG de France Telecom. En conséquence, L’ANACT (Agence Nationale pour l’Amélioration des Conditions de Travail) a lancé une campagne « Mieux vivre au Travail » articulé autour d’un site web : www.mieuxvivreautravail.anact.fr, pour prévenir le stress des salariés.
Le PDG de l’opérateur quant à lui avait annoncé un certain nombre de mesures pour enrayer cette « spirale terrible ». En Octobre, un cabinet d’expertise Technologia a réalisé un questionnaire qui a été envoyé par courriel aux 102.000 salariés français du groupe le 19 Octobre dernier. Un mois après, 76.000 salariés soit près de 75% des personnes interrogées, se sont exprimées massivement sur leur forte attente de changement, face au stress au travail.
L’analyse des réponses va donner lieu à un premier rapport qui devrait être présenté aux partenaires sociaux et à la Médecine du Travail avec y compris des mesures d’urgence à mettre rapidement en œuvre. D’autres études provenant du CHSCT (Comité d’Hygiène et de Sécurité et des Conditions de Travail, Médecine du Travail) ainsi qu’un millier d’entretiens proposés par une équipe pluridisciplinaire de consultants (sociologues, psychologues, médecins) doivent constituer un recueil de données qui donnera ensuite lieu à d’autres rapports présentés devant les partenaires sociaux, fin avril, début mai 2010. Un plan global de prévention et de recommandations devrait suivre et être remis à la Direction et aux syndicats. La Direction tiendra-t-elle compte de ce questionnaire ?
D’autre part, des mesures d’urgence ont été annoncées en Septembre : arrêt des restructurations et des mobilités forcées jusqu’à la fin de l’année, recrutement de 380 personnes en contrat à durée indéterminée… Mais les syndicats revendiquent une remise à plat complète du mode de management et des embauches :
D’une manière générale, les psychologues dénoncent dans le stress et la violence au travail un phénomène grandissant qui frappe toutes les catégories professionnelles et tous les types d’entreprises. En effet, le stress est le mal du siècle. Le syndrome de France Télécom gagne toutes les entreprises et tout particulièrement les « hybrides » telles que Pôle emploi, passées du public au privé, où un management à l’anglo-saxonne bouleverse les choix de vie des anciens fonctionnaires et sont caractérisées par des « laboratoires de l’antipathie au travail », selon le politologue, Gildas Renou.
La situation est d’autant plus délicate à vivre que la France a fermé les yeux depuis fort longtemps. Le management a évolué ces vingt dernières années en privilégiant les objectifs financiers, avec une masse sans cesse grandissante de travail et de nouvelles technologies. Cependant, les pouvoirs publics, les directions et nombre de syndicats ont donné la priorité à l’emploi, et non pas à la santé au travail. Du coup, « pas étonnant qu’on se prenne la série de suicides à France Télécom sur le bec » estime le psychiatre Jean-Pierre Soubrier, expert sur la Prévention des Suicides à l’OMS. « Les salariés qui vivent des pressions au travail ont un sentiment d’abandon. Ils ne savent pas à qui s’adresser : les entreprises les négligent, les gouvernements n’ont rien fait. » Le malaise au sein de l’ancien monopole public a servi d’électrochoc.